Secteur des engrais : de la pertinence de la Réforme

La réforme du secteur des engrais est une volonté de l’Etat. Le Plan de réforme a été adopté par décret (2018-046/PRN/MAG/EL) pris en Conseil des Ministres le 12 janvier 2018. Cette Réforme vise essentiellement à fournir des engrais de qualité, en quantité suffisante, à des prix accessibles et aux moments opportuns sur l’ensemble du territoire national.

La réforme des engrais, une volonté de l’Etat du Niger.

La décision de mener cette Réforme est consécutive à un diagnostic du secteur et plusieurs études qui ont révélé de nombreuses insuffisances qui freinent la performance de l’agriculture nigérienne.

La fiche de bonnes pratiques sur la commande groupée d’intrants agricoles : un mécanisme d’approvisionnement, élaborée par Adamou Mahamane Moustapha et éditée par la FAO en juillet 2012, relève ces insuffisances. « L’accès aux produits de la CAIMA reste toutefois aléatoire pour les raisons suivantes : les quantités insuffisantes ; les époques de livraison qui ne sont pas toujours adéquates ; les types d’engrais ne correspondant pas forcément à la demande des producteurs et productrices ; les fréquentes ruptures de stock ou l’indisponibilité des produits au moment voulu par les organisations paysannes », explique la publication.

Tous les acteurs concernés ont été associés au processus inclusif de la Réforme.

Selon les statistiques, la CAIMA a contribué à l’approvisionnement en engrais du Niger pour moins de 24.277 tonnes en 2017, 23.353 tonnes en 2018, et 16.321 en 2019 (Source : Ministère des Finances), alors que les besoins exprimés par les producteurs oscillent entre 100.000 et 200.000 tonnes par an.

Pour atteindre les objectifs de la réforme, l’Etat a mis en place des organes de dialogue, de surveillance et de veille commerciale, notamment, l’Observatoire du Marché des Engrais au Niger (OMEN) et le Comité Technique des Engrais au Niger (COTEN) avec des démembrements dans les huit régions du Niger.

Des résistances au changement

Toute réforme apporte des changements qui impactent les pratiques en cours et se heurte souvent à des résistances qui en retardent les résultats positifs. La Réforme du secteur des engrais n’a pas échappé à cette contingence.

La mise en œuvre de la plupart des activités prévues dans le Plan de la Réforme a pris plus de deux ans, au lieu d’un trimestre prévu pour leur implémentation. Idem pour la révision des textes qu’il fallait conformer aux objectifs de la réforme et leur application correcte par toutes les structures étatiques concernées.

L’engrais de la CAIMA était subventionné par l’Etat à hauteur de 50%. Beaucoup dans l’opinion se demandent si tous les milliards injectés par l’Etat à travers cette centrale ont réellement profité aux plus nécessiteux ou au plus grand nombre des producteurs nigériens. A l’épreuve des faits et des retours du terrain, la réponse est « non ! ».

Rendre l’engrais accessible à un plus grand nombre

La réforme du secteur des engrais fait la part des choses entre l’engrais subventionné géré par la CAIMA et le marché global de l’engrais pour les besoins de l’agriculture nigérienne.

Pour rectifier le tir concernant la subvention de l’Etat à l’endroit des populations vulnérables, la réforme du secteur des engrais prévoit une subvention ciblée, traçable, qui permet à l’Etat de repérer à l’avance les bénéficiaires, de connaître le nom et le village de chaque producteur ou productrice qui aura reçu la subvention. Le principe de la subvention ciblée a été appliqué avec satisfaction sur environ 7211 producteurs en 2020. Ceux-ci ont pu acheter chacun 4 sacs d’engrais à 6.750 FCFA au lieu de 13.500 ; ce qui a d’ailleurs substantiellement impacté leur production.

Le prix pratiqué par le secteur privé quant à lui est un prix réel, non subventionné. Il est donc normal qu’il ne soit pas fixé à 13.500 FCFA. Toutefois, il est espéré qu’à terme, ce prix par les jeux du marché et de la concurrence, soit moins élevé que le prix pratiqué par la CAIMA.

Le secteur privé joue  un rôle important dans la nouvelle donne.  Oumar Dia (photo), Président de l’Association Nigérienne des Importateurs et Distributeurs d’Engrais (ANIDE).

A la date du 13 avril 2021, le prix du 15-15-15 était seulement de 10.000 FCFA à Agadez (même si celui de l’urée était de 17.000 FCFA). Il est indispensable que l’engrais ne devienne pas un produit rare, mais plutôt un produit disponible pour tout le monde au lieu d’être le monopole de quelques rares privilégiés.

Les deux vrais défis pour le Niger en matière d’engrais sont d’abord de rendre ces engrais disponibles pour tous les producteurs, c’est-à-dire, au meilleur prix possible, par un secteur privé qui donne de bons signes d’efficacité dans un environnement qui favorise la libre concurrence ; il s’agit ensuite d’assurer le contrôle de qualité.

MCA-Niger accompagne l’Etat dans cette Réforme.

Il demeure aussi crucial de rendre traçable la subvention que l’Etat consacre aux petits producteurs bénéficiaires pour s’assurer qu’elle « rentre effectivement dans leurs mains ». C’est une exigence de la gouvernance et de justice sociale.

La réforme doit être appréciée dans une perspective de développement de l’agriculture du pays à travers un de ses secteurs importants, le secteur des engrais au Niger où 80 % de sa population vivent en milieu rural.

Dans ce processus de réforme du secteur des engrais, MCA-Niger est un partenaire stratégique dont l’Etat du Niger a sollicité l’accompagnement technique et financier pour le succès de cette initiative pour le bien des producteurs.